L’ocytocine, hormone de l’amour est très importante dans divers processus liés à notre survie. Une interview de Michel Odent, l’accouchement n’est pas une maladie ainsi qu’une une conférence pour graines de vie (assez longue (1h36) et le son d’assez mauvaise qualité) sur le thème la naissance à l’ère du plastique m’ont donné envie de retranscrire les grandes idées de ce monsieur :-).

Michel ODENT est obstétricien, chirurgien, et auteur de publications scientifiques et divers ouvrages tel que Mon bébé est un mammifère.
Voici l’interview de Michel Odent par Béatrice Solter sur RCF (25 minutes) à ne pas louper pour toutes les femmes enceintes. Un sujet pour tous ceux qui ont un intérêt pour l’avenir de l’humanité.
Voici un petit sommaire pour ce long article
Un accouchement naturel
Nos racines mammifères
Un flots d’hormones
L’hormone de l’amour
L’hormone maternante
Fuir ou lutter
L’anti-douleur naturel du corps
La socialisation de l’accouchement par étape
Transformation du rôle de la sage-femme
L’accouchement à la maison
La masculinisation de l’accouchement
Le conditionnement culturel
Une perception erronée de l’accouchement physiologique, naturel
Comment cela se passe-t-il aujourd’hui ?
La péridurale
L’ocytocine de synthèse
Les césariennes
Pour finir sur une note positive…
Un accouchement naturel
Nos racines mammifères

Pourquoi ne pas prendre exemple sur les autres mammifères qui arrivent à accoucher plus rapidement et sans aide ? Ceux-ci recherchent un endroit sûr et calme pour mettre au monde leur petit.
Les femmes ont besoin d’intimité pour accoucher c’est à dire : du silence, d’obscurité, de liberté de mouvement. Elle doit se sentir en sécurité sans se sentir observée, tel est le rôle protecteur de la sage-femme.
Le néocortex, partie du cerveau apparue la plus récemment à l’échelle de l’évolution, essentiellement présent chez les mammifères, ne doit pas être stimulé. C’est la partie qui pense, qui réfléchit de façon rationnelle et l’homme est le seul être à pouvoir court-circuiter ses instincts par son intelligence.
La nature a trouvé la solution, mettre ce néocortex « en veille » afin que les hormones, messagers chimiques du corps puissent entrer en action.
Un flots d’hormones
Diverses hormones interviennent durant le travail et la naissance. Celles-ci proviennent de notre cerveau primitif et exercent une forte influence sur nos comportements et émotions.
– L’hormone de l’amour

Voici l’hormone la plus importante : l’ocytocine (du grec õkytokíne : « accouchement rapide»). Elle joue un rôle dans la reproduction, la grossesse, l’accouchement, l’allaitement, l’attachement.
Elle est nécessaire pour commencer le travail et provoque les contractions. Si les conditions citées précédemment sont réunies, la maman aura dans le corps une concentration en ocytocine jamais égalée qui va permettre un attachement important et instantané avec son bébé.
Suite à la naissance de l’enfant, cette hormone va permettre au placenta d’être expulsé et à l’utérus de se rétracter afin de réduire les hémorragies.
Lors de l’allaitement, la succion du mamelon entraîne des secrétions d’ocytocine, ce qui entraine l’éjection du lait. Ces bouffées d’ocytocine vont renforcer le lien d’attachement entre la mère et son enfant à chaque tétée. Au fil des mois ou des années, ces concentrations d’ocytocine permettent à la maman de rester détendue malgré les défis imposés par l’arrivée du bébé.
Elle joue également un rôle dans les liens amoureux et sociaux.
– L’hormone maternante

La prolactine est la principale hormone de l’allaitement et de la production de lait par les glandes mammaires. Elle permet de déclencher et de maintenir la lactation suite à l’accouchement. Les seins seront plus réceptifs à la prolactine si le bébé tète précocement après la naissance et fréquemment.
– Fuir ou lutter
L’adrénaline et la noradrénaline font parties des catécholamines et sont antagonistes à l’ocytocine. Les mammifères, dont nous faisons partis J, sommes faits pour accoucher dans la nature, où il peut être utile face à un danger de stopper le travail et de fuir afin de trouver un endroit plus tranquille. Lors de la phase du travail, un sentiment de peur, de danger stimule la production de catécholamines.
Lors de la naissance, un pic de catécholamines permet à la mère de pousser pour expulser son bébé. Souvent, les femmes, qui ont vécu un travail de façon naturelle, veulent se mettre debout. A ce point de non-retour, ces hormones permettent une sortie rapide du bébé et une possibilité de fuir à la mère avec le bébé dans ses bras.
– L’anti-douleur naturel du corps
Il s’agit de notre amie la bêta-endorphine, connue pour ses effets analgésiques et euphorisants. Elle permet pendant la phase de travail de soulager la douleur et d’être « déconnectée », sur une autre planète.
Lorsque la douleur est trop forte, des taux élevés de bêta-endorphines peuvent permettre de diminuer la concentration en ocytocine afin de ralentir le travail.
Les endorphines sont secrétées durant les rapports sexuels et durant l’allaitement. La bêta-endorphine aide la sécrétion de prolactine, et est présente dans le lait maternel ce qui rend nos bébés happy :-).
Pourtant, suite à des millénaires de socialisation de l’accouchement faite de croyances, de rituels, nous avons amplifié les difficultés de l’accouchement et donner l’idée qu’une femme n’est pas capable d’accoucher sans aide. Nous avons même réussi à neutraliser l’instinct maternel protecteur et agressif de la mère. C’est-à-dire ? Comme le dit Michel Odent, il suffit d’imaginer prendre le nouveau-né à une maman Gorille qui vient d’accoucher…
Nous avons voulu contrôler l’accouchement. Comment contrôler de façon subtile ? La réponse : proposer son aide.
Hors l’accouchement est un processus involontaire, on ne peut pas l’aider. Par contre, protéger la femme qui accouche contre l’inhibition de ce processus involontaire est possible.
La socialisation de l’accouchement par étape
– Transformation du rôle de la sage-femme
Dans des temps lointains, une femme (mère, grand-mère) avait pour rôle d’assurer la protection du périmètre autour du lieu où la femme avait choisi d’accoucher. Voici les origines de sage-femme. Ce rôle a peu à peu changé passant de la protection au contrôle (compression de l’abdomen, introduction de doigts dans le col de l’utérus ou encore accélération du travail grâce à des herbes).
– L’accouchement à la maison
Accoucher à la maison ne veut pas forcément dire accoucher de façon physiologique. La façon dont on accouche est bien plus importante que le lieu. On oublie souvent que l’ocytocine est une hormone timide…encore plus timide dans un environnement masculin. Au milieu du 20ème siècle, on semble tout de même encore savoir que l’ocytocine est moins timide dans un environnement féminin et qu’accoucher est une affaire de femme.
– La masculinisation de l’accouchement
Au moment où le besoin du bébé d’être avec sa mère a été découvert (voir le conditionnement culturel), la participation du père à l’accouchement a commencée. Tout a changé très rapidement.

Le nombre de médecins augmente de façon explosive, des médecins spécialisés, souvent des hommes. Le dogme du père qui doit être présent à l’accouchement se met en place. La présence du père rend souvent l’accouchement plus long et difficile. En situation de peur ou de stress, l’adrénaline est secrétée et bloque l’ocytocine. De plus, si la personne autour de la maman en secrète, celle-ci en secrétera aussi. Pour plus d’infos sur l’accouchement et la présence du père c’est ici.
Et enfin, l’arrivée de machines sophistiquées contribue à cette masculinisation, puisque la haute technologie est souvent associée à un milieu masculin.
Le conditionnement culturel
Il n’y a encore pas si longtemps (environ ½ siècle), on ne savait pas qu’un nouveau-né avait besoin de sa mère. Un peau à peau n’était pas imaginable, les soins devaient être administrés par quelqu’un d’autre que la mère. Par croyance, l’Homme pensait que le bébé devait être retiré de sa mère dès la naissance car le colostrum était considéré comme dangereux. Le rituel était de couper rapidement le cordon ombilical pour éloigner le bébé de sa mère.

C’est au cours du 20ème siècle, que l’on s’est finalement rendue compte que si une personne doit être avec le bébé c’est la mère pour tout un tas de raisons. Par exemple, le bébé est programmé pour trouver le sein dans l’heure qui suit la naissance. Le colostrum n’est pas un poison mais au contraire très riche en protéines et anticorps.
Comment sortir de ce conditionnement ? Une raison optimiste de penser que cela peut changer est la connaissance de la physiologie moderne qui va pouvoir prendre en compte les besoins de base de la femme qui accouche. Une raison pessimiste de penser que cela ne va pas changer est la vision actuelle d’un accouchement naturel, physiologique.
Une perception erronée de l’accouchement physiologique, naturel
Actuellement dans les écoles où l’on forme les personnes pour aider les femmes à accoucher « naturellement », des messages erronés sont véhiculés et donc retransmis aux femmes enceintes. On leur apprend comment respirer, comment pousser ce qui fait appel au néocortex et qui va à l’encontre du processus involontaire qu’est l’accouchement.
Cette vision faussée d’un accouchement « naturel » passe par des messages visuels renforcés par du vocabulaire (coach, besoin de soutien, d’énergie,…). Une épidémie de vidéos de naissance « naturelle » envahit internet. C’est toujours la même histoire selon Michel Odent : une femme qui accouche, 1 homme et 4 personnes autour…loin des conditions idéales pour libérer les hormones nécessaires pour que tout se déroule au mieux. Une naissance naturelle ne se résume pas au fait d’accoucher dans une piscine ou à la maison.
Comment cela se passe-t-il aujourd’hui ?
Tout d’abord, les conditions nécessaires pour un accouchement naturel selon Michel Odent ne sont que rarement réunies dans un hôpital. Les femmes perdent leurs capacités à accoucher, à allaiter. De nombreuses futures mamans ont des projets en tête qui en réalité n’aboutissent pas. De nombreux accouchements commencés à la maison finissent à l’hôpital et de nombreuses femmes qui voulaient allaiter abandonnent au bout de quelques jours, semaines ou mois. Les césariennes et les perfusions d’ocytocine sont de plus en plus fréquentes.

L’accouchement est hypermédicalisé et les besoins de base de la femme qui accouche sont incompris. Les accouchements sont de plus en plus longs et difficiles. L’institution médicale est très forte, très présente et rend inutile le système physiologique de la femme qui devient de plus en plus faible…les hormones de l’amour sont rendues inutiles.
La péridurale
Nous voulons à tout prix supprimer les douleurs de l’accouchement en posant une péridurale. Seulement quand il y a une douleur physiologique, un système physiologique de protection contre la douleur est activé. Comme nous l’avons vu précédemment des endorphines sont libérées et ont d’autres implications puisque la principale endorphine favorise la libération de prolactine, l’hormone du maternage, l’hormone de sécrétion du lait.
Ces endorphines diminuent la perception de la douleur et produisent un état altéré de conscience, état nécessaire pour inhiber les fonctions rationnelles du néocortex et faire prédominer les autres fonctions qui contrôlent l’accouchement. Les hormones en jeu lors de l’accouchement constituent une chaîne d’élément. Lorsque l’on retire un maillon de la chaîne en remplaçant les endorphines naturelles par une péridurale, on perd le reste des processus physiologiques.
Il est nécessaire de comprendre qu’il ne faut pas essayer d’extraire la douleur mais de rendre l’accouchement le plus facile possible pour éviter de donner des médicaments contre celle-ci.
Quand une péridurale est mise en place, il y a une modification du système hormonal qui entraîne un déséquilibre, la plupart du temps suivi d’une injection d’ocytocine synthétique.
L’ocytocine de synthèse
Tout comme la péridurale, l’ocytocine de synthèse bloque libération des hormones naturelles. Ces injections d’ocytocine de synthèse sont très fréquentes mais peu connues du grand public. Elles ne sont pas considérées comme un acte médical, ne sont pas intégrées pas dans les statistiques. Ce n’est pas vraiment un médicament, c’est une « hormone ». Cependant, les concentrations injectées sont bien plus élevées que les concentrations naturellement présentes dans notre organisme, et la libération n’est pas la même.
Les césariennes
Les accouchements sont de plus en plus difficiles ce qui conduit à un nombre de césariennes de plus en plus élevé. Michel Odent pose notamment cette question : Quel avenir pour une humanité né par césarienne ? La façon de naître a des conséquences à long terme.
La flore intestinale des bébés nés par voie basse et celle des bébés nés par césarienne est très différente. En effet, les bébés nés par voie basse sont en relation avec les microbes des voies vaginales de leur mère. Ces microbes commencent à constituer le microbiome du bébé (qui représente environ 80% du système immunitaire). Les anticorps maternels transférés au bébé via le placenta vont permettre de faire face à ces nouveaux germes, qui deviennent alors familiers et amicaux. Lors d’une césarienne, les premiers microbes rencontrés seront ceux de l’hôpital.
Les césariennes compromettent l’allaitement, la maman ne pouvant pas allaiter de suite et n’aura pas le pic d’ocytocine qui favorise la prolactine et donc la mise en place de la lactation.

Les césariennes peuvent avoir d’autres conséquences sur la santé des bébés. Toutes ne sont pas développées dans cet article, pour plus d’infos le livre de Michel Odent, Césariennes : questions, effets, enjeux – Alerte face à la banalisation.
Pour finir sur une note positive…

Les hommes ont aujourd’hui l’idée qu’une femme ne sait plus accoucher seule. Michel Odent a pu assister aux réactions des pères suite à la naissance naturelle de leur bébé. Ils sont plein d’admiration, de respect et remplis d’amour pour leur femme qui a accouché seule. Cet état d’amour renforcé pour la mère facilite l’attachement entre le père et son bébé.